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En janvier 2023, l’UIC et l’UIRR ont publié leur 8e rapport sur le transport combiné européen. Dans ce numéro de « Combilettre », nous vous proposons un résumé de ce document et une synthèse de ses analyses les plus saillantes.

RETROUVEZ LE RAPPORT ICI

Un rapport de référence à deux mains

Sobrement intitulé « Le transport combiné en Europe en 2022 », le rapport est une réalisation conjointe de l’Union Internationale des chemins de fer (UIC) et de l’Union internationale du transport combiné rail-route (UIRR), deux organisations internationales faisant référence dans leurs domaines :

  • l’UIC est l’organisation internationale du transport ferroviaire, notamment chargée de ses normes communes (les fameuses « fiches UIC ») ; elle a été créée en 1922 et a son siège à Paris ;
  • l’UIRR est l’organisation européenne de promotion du transport combiné rail-route ; elle a été créée en 1970 et a son siège à Bruxelles.

La vision d’ensemble du transport combiné en Europe proposée par le rapport porte aussi bien sur le transport combiné rail-route que fleuve-route et mer-route. Elle porte sur tous les pays européens, membres de l’UE ou non. Les chiffres présentés proviennent principalement de l’UIC et de l’UIRR, mais également d’Eurostat.

Le précédent rapport datait de 2018 : cette livraison de 2022 est donc marquée par les conséquences de la crise sanitaire de 2020, mais aussi par le « Green Deal » européen, ce vaste programme de relance et d’investissements destiné à rendre le continent neutre en carbone d’ici 2050.

Une vision d’ensemble du transport combiné européen

Le rapport commence par rappeler la définition légale du transport combiné, telle qu’issue de la directive européenne 96/106/CEE, premier texte communautaire sur le sujet, datant de 1996. Les auteurs rappellent qu’un transport de marchandises peut être soit unimodal (un seul mode de transport d’un bout à l’autre), soit multimodal (plusieurs modes de transport), ce dernier comprenant le « transport intermodal », c’est-à-dire effectué au moyen d’une unité de chargement unique de bout en bout (« ILU » en anglais ou « UTI » en français). Au sein du transport intermodal, enfin, le « transport combiné » se distingue par le recours aussi large que possible, pour la part principale du trajet, aux modes ferroviaire, fluvial ou maritime short sea, alors que le pré/post acheminement est effectué par le mode routier.

De ce fait, le rapport souligne l’importante efficacité du transport combiné, aussi bien économique (par la massification des flux qu’il permet) qu’environnementale (par la limitation des coûts externes de pollution, d’émissions de GES, de bruit et d’accidentologie), et ce quelles que soient les configurations qu’il prend (transport de l’UTI accompagné ou pas) ou le type de distance qu’il parcourt (domestique, international, intercontinental).

Le rapport rappelle ensuite le contexte du transport combiné, et d’abord les différentes parts modales en Europe qui sont de 6% (voies navigables), 18% (rail) et 75% (route) – ces proportions étant stables depuis une dizaine d’années, quoique celles du rail et des voies navigables soient en lente érosion. Prises par pays, ces proportions sont par ailleurs très hétérogènes, le rail étant plus fort en Europe du Nord et de l’Est. La France est dans la situation qu’on lui connaît bien d’avoir une part modale routière très élevée (88%) au regard de sa part rail (10%) et fluviale (2%).

Concernant le transport combiné rail-route, qui représente le tiers du fret ferroviaire en moyenne en Europe, le rapport pointe également la diversité des pays européens et suggère la relation inversée qu’il entretient avec le fret ferroviaire : plus la part de celui-ci dans l’ensemble du transport est élevée, moins le transport combiné y est dominant.

Concernant le transport combiné fleuve-route, le rapport développe une intéressante analyse en rapprochant les trafics et la longueur des réseaux.

Le rapport observe également des évolutions intéressantes pour le transport combiné européen, par exemple la lente tendance à l’accroissement des poids des UTI ou le taux de service des trains (60% de ceux-ci arrivant avec moins d’une heure de retard, dans une proportion d’ailleurs plus importante en trafic domestique qu’en trafic international).

De façon générale, l’UIC et l’UIRR constatent que le transport combiné a crû de 50% ces 10 dernières années et soulignent l’importance considérable de son potentiel, considérant qu’un tiers des marchandises transportées en Europe le sont sur des distances de plus de 300km. Le rapport détaille ce constat et ces prévisions par différents segments de marché, y compris en distinguant les trafics accompagnés (principalement ceux des autoroutes ferroviaires) et non-accompagnés.

Les attentes du secteur, les dispositifs de soutien, leurs limites et les perspectives de croissance

Le rapport développe ensuite certains constats issus d’une enquête réalisée auprès des opérateurs par l’UIC et l’UIRR. On discerne notamment une tendance à l’intégration (les opérateurs cherchant à internaliser leurs ressources : wagons, locomotives, terminaux). La vision de l’avenir du secteur et du bien-fondé des politiques communautaires reste favorable.

Le rapport passe ensuite en revue, de façon exhaustive, les dispositifs de soutien au transport combiné pour chaque Etat membre. Toutefois, les auteurs attirent l’attention sur la persistance de goulets d’étranglement, provoqués par le manque de terminaux, les limites du transport fluvial, les limites du transport ferroviaire, les limites du transport routier et l’insuffisance de la législation.

Une étude sur les coûts du transport combiné

Le rapport intègre ensuite une étude mettant en exergue les structures des différents coûts occasionnés par le transport de marchandises en mode tout route et en mode combiné.

L’étude porte sur 5 composantes de coûts : les coûts fixes, les coûts variables, les coûts de personnels, les coûts spécifiques (dont les péages d’infrastructures) et les coûts d’« affaires » (ces derniers désignant les bâtiments et les terminaux).

Cette étude reprenant des analyses et des données remontant à plusieurs années, elle ne prend pas en compte les récents phénomènes de flambée des coûts énergétiques et salariaux. De plus, elle ne présente pas les coûts en valeurs absolues mais seulement en pourcentages du total, en guise d’indication générale. Néanmoins, certains résultats sont intéressants, par exemple le fait qu’en moyenne, sur le corridor européen RFC3 le plus fréquenté du continent, les coûts du TCRR sont 20% inférieurs à ceux du transport tout route.

Les promesses offertes au transport combiné par la vague de digitalisation

Le rapport présente ensuite un développement intéressant sur la révolution de la digitalisation et du numérique dans le transport combiné. Il dresse d’abord un état des lieux des possibilités actuellement offertes par ces technologies, par exemple en matière de tracking des UTI, d’exploitation ferroviaire ou terminaliste. Il dresse la liste des standards et normes s’imposant aux formats d’échanges de données, ainsi qu’une monographie des principales entreprises aptes à fournir ces services. Il présente la Roadmap élaborée par l’UIRR en 2019 et courant jusque 2030 pour la digitalisation des principales fonctions du transport combiné rail-route. Enfin, il souligne les limites et les barrières à ces démarches et fait une part spéciale à l’enjeu de la cybersécurité.

La révision de la directive européenne sur les poids et mesures

Dans sa dernière partie, le rapport revient sur l’enjeu de la révision, prévue en 2023, de la directive européenne 96/53/EC fixant les poids et les dimensions maximales des véhicules routiers de transport de marchandises. Il fait d’abord un panorama très complet des réglementations, à partir de ce standard européen et jusqu’aux réglementations nationales pour tous les pays européens, y compris pour les pré/post-acheminements routiers du transport combiné. Il évalue ensuite l’impact d’une éventuelle modification de cette réglementation en 2023 pour le transport combiné.

Pour aller plus loin : lisez la version intégrale du rapport (en anglais) en cliquant ici.